" Je suis la Charité, l'amie
" Qui se réveille avant le jour,
" Quand la nature est endormie
" Et que Dieu m'a dit : A ton tour.
" Je viens visiter la chaumière
" Veuve de l'été si charmant !
" Je suis fille de la prière,
" J'ai des mains qu'on ouvre aisément.
" Je prie, et jamais je n'ordonne ;
" Chère à tout homme, quel qu'il soit ;
" Je laisse la joie à qui donne,
" Et je l'apporte à qui reçoit. "
O figure auguste et modeste,
Où le Seigneur mêla pour nous
Ce que l'ange a de plus céleste,
Ce que la femme a de plus doux !
Au lit du vieillard solitaire
Elle penche un front gracieux,
Et rien n'est plus beau sur la terre,
Et rien n'est plus grand dans les cieux.
Elle va dans chaque masure,
Laissant au pauvre réjoui
Le vin, le pain frais, l'huile pure,
Et le courage épanoui !
Puis elle cherche un coin des bornes,
Transis par la froide vapeur,
Ces enfants qu'on voit nus et mornes
Et se mourant avec stupeur.
Ah ! voila surtout ceux qu'elle aime !
Faibles fronts dans l'ombre engloutis,
Parès d'un triple diadème,
Innocents, pauvres et petits.
Et si, le front dans la lumière,
Un riche passe en ce moment,
Par le bord de sa robe altière
Elle le tire doucement.
" Ah ! donnez-moi pour que je donne !
" J'ai des oiseaux nus dans mon nid.
" Donnez, méchants, Dieu vous pardonne.
" Donnez, Ô bons, Dieu vous bénit ! "